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L’église Notre Dame de Cheffes

La nef

Vous êtes dans l’église Notre Dame de CHEFFES. Quand vous franchissez le porche, vous entrez dans la nef construite en 1855 pour agrandir l’église, exhausser le sol et renouveler le plafond. On en profita alors pour la faire pivoter vers la place ; la façade fut même élevée en biais et le conseil municipal de l’époque se déclara très contrarié de ne pouvoir la tourner plus encore, » mais il reconnaît qu’il ne peut rien à ce malheur  » (18 mai 1855). Cette partie néogothique paraît disproportionnée : elle cache en grande partie la tour ancienne du clocher que vous ne découvrirez bien qu’en descendant vers la Sarthe.
La modernisation et l’aménagement se poursuivirent jusqu’au début de notre siècle. Entre 1895 et 1901, on installa les statues, on décora les murs et les voûtes, on posa les boiseries et les tribunes.
Les vitraux de la nef représentent les saints patrons des pieux donateurs de cette époque – voir les médaillons en bas des vitraux – Henri, Louis, Eugène, Sosthène.
La nef ancienne, plus étroite, percée de petites ouvertures romanes et voûtée de bois, n’avait pas ces dimensions et cette lumière. L’autel moderne fut construit en 1967 à la croisée du transept juste sous le clocher. L’oie sculptée dans une pierre de tuffeau provient des ruines d’un ancien logis située autrefois dans la campagne cheffoise.

Le transept – Le Choeur – L’Abside

Cette partie ancienne est classée et date de la deuxième moitié du 12ème siècle.
Au dessus de l’autel, la voûte d’ogives marque le début du gothique. A cette période, on commence à construire des voûtes plus bombées soutenues par des arcs croisés. Ils sont décorés de trois tores ronds et reposent sur les chapiteaux des quatre piliers d’angles. Les décors que l’on utilise sont encore romans : des dents de scie, des écailles, des feuilles et des crosses de fougères, des tresses et des têtes d’animaux, deux curieux hommes barbus, l’un tirant sur sa barbe l’autre portant un poisson dans les bras.
Outre la symbolique chrétienne du poisson, on peut y voir une allusion directe aux droits de pêche accordés aux moines fondateurs pour faire vivre leur communauté (1060). Derrière l’autel, le chœur s’ouvre, prolongé par l’abside arrondie en cul de four. Le berceau et les arcs sont légèrement brisés, soutenus par des colonnes aux chapiteaux plus naïvement sculptés : deux lions, des têtes juste ébauchées, de simples spirales. La voûte du choeur enduite vers 1900 laisse apparaître des peintures murales que l’on doit au peintre et décorateur italien Paulo BARONI installé à Angers vers 1750. Les trois fenêtres du fond ont été agrandies. A l’extérieur, on voit encore les arcs des anciennes ouvertures romanes.
Dans le passage du chœur vers le croisillon sud (l’autel de Ste Thérèse), une curieuse plaque d’ardoise gravée en lettres onciales témoigne de la consécration de cette partie de l’église. On y précise l’époque (1167), les reliques déposées dans l’autel, le nom des grands qui régnaient alors, les obligations du prieur, et le texte se termine prosaïquement en donnant « la mesure des chandelles que les moines doivent avoir aux jours de fêtes et aux fériés quand ils se lèvent la nuit », la longueur étant en rapport avec la durée des offices.
Au-dessus du linteau voûté de ce passage, sculpté en clef : l’oie proverbiale de CHEFFES sur un blason. En 1574, Pierre MARIAN ou MARIAU abbé de St Serge d’Angers, chanoine de Paris et curé de CHEFFES porte dans ses armes une « oie de gueule (rouge) sur fond d’argent ». Reste à savoir s’il apporta ses armoiries à CHEFFES ou s’il prit comme siennes celles du prieuré.

Le clocher tors de l’église Notre Dame de Cheffes

C’est un des rares clochers octogonaux de cette époque en Anjou. La tour de tuffeau, réalisée au 12ème siècle, annonce le style Gothique Plantagenêt par ses ogives intérieures. A l’abri des intempéries, visibles de la place, quelques modillons subsistent sous les corniches : tête de poisson, pointe de diamant, femme en coiffe… prenez vos jumelles ! Illustrant l’administration territoriale de cette époque, au cœur même du texte latin gravé dans l’ardoise sur la plaque de consécration en 1167, on lit : « Ceci est fait du temps d’Alexandre III pape de Rome, le roi de France était Louis, fils de Louis le Gros et le roi d’Angleterre Henri le second qui fut prince des Normands et des Aquitains et des Bretons et comte des Angevins, fils de Geoffroy comte d’Anjou ». Sculpté en clef de voûte, un blason porte l’oie emblématique de Cheffes. Ce sont les armoiries de Pierre Marian, abbé de Saint Serge d’Angers, chanoine de Paris, mais aussi prieur curé en 1574 : une oie rouge sur fond d’argent, surmontée de la crosse abbatiale. En 1855, on remplace la nef ancienne dont le plafond de bois s’effondre et qui ne peut recevoir une population qui s’accroit. Plus large et plus haute, la reconstruction néo- gothique s’oriente en biais vers la place et masque en partie le clocher.

La Chapelle Notre-Dame des Eaux

La chapelle Notre Dame des Eaux également appelée Chapelle St Sulpice aurait une origine mystérieuse, certains la situant sur l’emplacement d’un centre cultuel primitif. Construite au XI ème ou XII ème siècle, elle fut restaurée en 1882 dans le goût de la Renaissance. Au-dessus de la porte d’entrée, Notre Dame de Sion, patronne des mères chrétiennes. Les murs attestent d’une origine beaucoup plus ancienne ; l’arc visible du côté de la rivière date du XI ème siècle. Le chevet plat conserve les traces d’une fenêtre ou d’une niche du XV ème siècle.
A l’intérieur, le décor est modeste : la nef est en charpente et plancher de bois peint comme celle de l’église autrefois. Deux groupes de statues du XIX ème siècle encadrent l’entrée : une Piéta et une Vierge à l’enfant. Dans le chœur veille Notre Dame de Cheffes, deux têtes sculptées polychromes habillées.
En 1716, Ballain cite Notre Dame de Saint Sulpice comme un lieu de pèlerinage où  « il s’est fait autrefois beaucoup de miracles ».
Quant à l’appellation « Notre Dame des Eaux », venez voir l’hiver quand la Sarthe se gonfle si la réalité ne s’impose pas quelquefois.

L’écluse

Utilisée dès le Moyen-âge pour le commerce, la rivière Sarthe fut aménagée au XIX ème siècle pour améliorer la navigabilité. Les écluses à sas remplacèrent les portes marinières facilitant le transport par la rivière du charbon, des céréales, du chanvre, du bois et du marbre, sans oublier le vin et le tuffeau. Le chemin de fer qui se développa au milieu du XIX ème siècle mit un terme au commerce fluvial sur l’ensemble des rivières navigables de l’Anjou.
D’après le cadastre napoléonien de 1828, on constate que l’ancienne « écluse » à Cheffes n’était qu’un passage d’eau à ouverture simple (porte marinière), qui nécessitait le treuillage des bateaux soit 1h30 de manœuvres.
De grand travaux, suite à la canalisation de la Sarthe pour faciliter le transport, entre 1848 et 1872, ont abouti au réaménagement de l’écluse actuelle en 1851 orientée depuis vers le port.
Le barrage est rehaussé de 35 cm en 1856.
L’écluse de Cheffes est la 20 ème depuis Le Mans et la dernière sur la Sarthe avant Angers. Elle est à sas, double porte en métal, dont les dimensions sont de 31 m sur 5,20 m avec un enfoncement de 1,50 m.
Elle appartient à l’Etat, acquisition du terrain en 1847, la gestion est assurée par le Conseil Général. De nos jours, l’écluse vit au rythme des bateaux de plaisance.

Le moulin

« Ce grand bâtiment XIXe qui traverse la Sarthe, à Cheffes, est plutôt le témoin d’une architecture industrielle »
« Le moulin d’aujourd’hui remonte à 1850. Dans un premier temps, il ne fait que les deux tiers de sa longueur actuelle. Il a été rallongé une dizaine d’années après sa construction. Un mastodonte, avec ses six niveaux qui s’étalent chacun sur 500 m2. Impressionnant, il abrite trois roues dans trois passages d’eau qui entraînent 21 paires de meules. Le moulin servit d’abord de minoterie »
« En 1901, le moulin est racheté. C’est un tout autre industriel qui s’y installe : la manufacture de crayons Joubert. L’énergie du moulin sert cette fois à faire fonctionner des tours sur lesquels sont façonnées les mines de crayon. En graphite, pour les crayons noirs ; de pastel, pour les crayons de couleur. »
« Dès 1911, M. Joubert utilise aussi l’énergie du moulin pour produire de l’électricité. Pour sa consommation personnelle. « Une canalisation électrique court le long du canal jusqu’à sa maison. » Son fils, avec l’aide d’un autre industriel, installe une première turbine en 1927.
Tous deux fondent le premier syndicat électrique. L’électricité qu’ils produisent servira à éclairer le bourg de Cheffes dès 1930, « mais pas encore les écarts ». Le syndicat vend aussi de l’électricité aux particuliers.
Après la Seconde Guerre mondiale, c’est encore un tout autre industriel qui s’y installe. Armand Guemas est grainetier. Le moulin est alors dans un état sans doute piteux, puisqu’il est vendu « à démolir ». Il sert de stockage, un peu de fabrication d’aliments pour le bétail. Et continue de produire de l’électricité qui est désormais vendue à EDF, créée après la guerre. »

extrait d’une interview d’André Grazélie en 2016 pour le journal Ouest France

Aujourd’hui le moulin de Cheffes est la propriété de la communauté de communes Anjou Loir et Sarthe. En 2020, un projet de production d’hydroélectricité par turbines est toujours d’actualité.

 

Le Port historique de Cheffes

Texte en cours d’écriture…

 

Le cul de bateau, élément du port historique

Rencontre des gens de la terre et des gens de l’eau : un beau port fluvial, c’est une vaste pente douce solidement empierrée, qui supporte sans dommage les attelages sans se transformer en bourbier et permet un accostage sans danger pour les coques de bois des chalands ; c’est aussi l’entrepôt pour les matériaux en attente, qui s’égouttent s’il pleut ou si la rivière déborde un peu de son lit.

Vous n’entendez pas ? La cadence des battoirs qui frappent le linge trempé sur le bord du bateau lavoir ; les laveuses qui s’interpellent et les gars des bateaux qui s’en mêlent. Des draps suspendus au fil du séchoir, qui claquent au vent de la vallée. Le roulier, d’un mot, calme son cheval impatient le temps du chargement ; les tuffeaux et les ardoises s’entassent sur la charrette. Les pelles glissent dans le sable, les fourches piquent le tas de pierre. Les sabots de bois et les brouettes font résonner la planche, passerelle instable entre le pont du bateau et la rive. Les fers de roues cerclées écrasent le gravier en remontant le chemin. Le jeune apprenti, avec sa pelle de bois, jette l’eau par- dessus bord, vide la cale toujours prête à boire la rivière. Le va et vient de la scie, l’herminette qui retaille ; le maillet et le marteau qui chevillent, qui clouent. Le charpentier rajuste les bords du chaland fatigué qui mérite bien quelques soins pour demeurer presque étanche. Le cordier allonge son fil, patient marcheur qui sifflote au long de ses allers et retours ; il torsade sans raccord ni épissure le billon du marinier. Tendu entre le cheval et le bateau, le cordage glissera sans accroc, courbant les hautes herbes du chemin de halage, jusqu’à bon port, à Angers, à Sablé ou au Mans.

La croix Mahé

Appelées Croix Hosannières dans d’autres régions, les croix à colonne sont plus communes en Poitou et en Charente. Leur pied carré pouvait servir d’autel le temps d’une cérémonie.
Une autre croix maçonnée s’élève près du cimetière de Cheffes : c’est la Croix Blanche qui fut autrefois au milieu du carrefour, voisine de trois moulins à vent qui ont disparu avec l’extension du village.
Les calvaires sont nombreux en Anjou. Situés à la croisée des chemins, on y faisait halte en procession aux Rogations, rituel de bénédiction des semailles au printemps. On parcourait alors la campagne en chantant la litanie des saints protecteurs. Dans les bourgs les reposoirs s’ y installaient pour le Sacre, à la Fête-Dieu. Les croix se sont élevées souvent sur des initiatives privées, matérialisant des remerciements ou des vœux exprimés dans des circonstances difficiles. Le nom de famille Mahé existe dans les registres de Cheffes au 17ème siècle. Le niveau actuel de la route témoigne des efforts de rehaussement réalisés pour conserver un passage hors de l’eau en période d’inondation. Formant une « levée », elle échappe ainsi aux caprices fréquents de la rivière ; mais les sentiers de randonnées des Basses Vallées qui suivent les anciens chemins sont habituellement submergés l’hiver comme les prairies naturelles qu’ils traversent.

Le manoir des Grandines

Ce manoir, maison de maître du 17ème siècle, a été la demeure de familles bien différentes : notaires, avocat, artiste peintre (Pierre Morain), agronomes et homme d’Etat s’y sont succédés. Ses occupants l’ont embelli et agrandi. L’artiste a profité du parc pour y construire son atelier, un peu à l’écart. Les agronomes y ont planté arbres et arbustes en abondance : il faut faire le tour par les chemins pour profiter au printemps des haies fleuries de lilas et de mahonias. L’express de Paris s’arrêtait spécialement à Tiercé pour Monsieur Joseph CAILLAUX, ancien Président du Conseil, qui avait trouvé ici un lieu de retraite et de sérénité. Madame CAILLAUX avait été précédée par sa réputation de femme redoutable et les cheffois n’ignoraient rien de sa détermination qui l’avait amenée à faire usage de son arme à feu pour défendre son honneur mis publiquement en cause dans la presse nationale. (Affaire Caillaux 1914).

De Joseph Caillaux, les Français ont surtout retenu qu’il fut le promoteur de l’impôt sur le revenu et que sa femme assassina, en 1914, le directeur du Figaro. Ce grand bourgeois venu de droite, qui fit souvent une politique de gauche, suscita des haines puissantes. Provocateur, insolent, imprudent, fabriquant du tragique avec le succès, Caillaux, figure étonnante de la III ème République dont il partagea les luttes pendant quarante ans, fut reconnu par le général de Gaulle comme « le premier homme d’Etat moderne ».

Le magnifique chêne vert classé qui trônait devant le manoir s’est effondré aux alentours de 2016, rongé à sa base par un champignon.